Yseult au Grand Théâtre de Tours
L’automne sera chaud

Dernière mise à jour le 24 décembre 2021

Elle a un sacré caractère, des rondeurs glorieuses, des mélodies convaincantes, des textes, disons, prometteurs, un culot d’enfer. Et une voix qui accroche, plus jazz que rap. Elle s’appelle Yseult et sera à l’Opéra de Tours en octobre 2021 (au lieu de mars), invitée par Le Temps Machine.

Quand on annonce Yseult sur la scène d’un opéra, c’est généralement parce que Tristan n’est pas loin. Le 12 octobre 2021, on en sera pour ses frais. Cette Yseult-là voyage seule, et, quand elle évoque son amoureux, c’est un « bad boy ». Rien à voir avec l’autre, plutôt propre sur lui.

Yseult s’est échappée de Nouvelle star sans avoir remporté la palme, et c’est peut-être tant mieux (que ceux qui connaissent le nom du vainqueur lèvent le doigt…). C’était en 2014, et la gamelle ramassée dans la foulée par son premier disque (La Vague), enregistré après avoir quitté le clinquant des studios télé, est sans doute ce qui l’a sauvée.

Elle n’a pas apprécié, normal, et c’est ce qui l’a décidée à claquer la porte du showbiz officiel qui risquait de lui bouffer sa personnalité : « Je ne l’aime pas, cet album. Je me suis aperçu que ce qui m’intéressait, en fait, c’était être derrière tout, la composition, les textes, le son… Maintenant, je n’ai pas de manageur, ni de directeur artistique, je fais tout et je sais dire non. C’est de la sueur, mais quand ça marche, tu te dis : meuf, tu n’as pas fait tout ça pour rien. » (Le Parisien) Cela dit, ce n’était pas si mal. Passons.

Une chanson pour papa

Réfugiée en Belgique (va savoir pourquoi) Yseult crée sa maison de production, écrit ses musiques et ses textes. Deux ans de boulot et puis… On y revient plus loin.

Sortie de sa dépression post-partum après l’accouchement de son premier album mal-aimé, elle est devenue mannequin. Acceptant un corps plus que généreux, Yseult en fait un instrument de lutte féminine. Un combat qu’elle va continuer dans ses clips où le budget costumes se réduit souvent à zéro. Pas sûr que papa apprécie, lui qui ne voulait pas qu’elle se lance dans la chanson. Mais ça ne nous regarde pas, même si Yseult pense avoir fait la paix avec sa famille en chantant : « C’était une thérapie accélérée, en particulier Corps, que j’ai écrite avec mes tripes et où j’arrive enfin à dire pardon à mes parents et à mon corps. Cela m’a fait du bien. » (Le Parisien)

L’image contient peut-être : 1 personne, danse et nuitLiberté des mots, liberté de la musique, liberté du corps. (Photo page Facebook d’Yseult -Thibault Théodore)

Si Yseult joue la provocation, emballée de Scel-o-frais (Corps), se balançant ficelée nue dans des cordes de shibari (un art érotique japonais où l’on se saucissonne élégamment, comme l’expliquent Les Inrocks) voire carrément dans un non-costume de bondage au début de son clip (Bad Boy), c’est sans doute pour affirmer qu’elle assume ses rondeurs autant que sa liberté. Mais on ne peut pas s’empêcher de penser que c’est aussi pour faire le « buzz », autrement dit retrouver les travers de ce showbiz qu’elle dit abhorrer.

Du jazz dans le rap

Résultat, on parle beaucoup de ses clips, mais on a tort. Tout ça, c’est du cinéma et ce qui compte c’est la voix. Là, ça secoue. Pas besoin de provoc’, Yseult accroche l’auditeur. Une voix légèrement rauque, chaude, parfaitement jazzy, capable de monter crânement dans les aigus sans trop forcer. Ce n’est pas parfait mais ça peut le devenir. Yseult, sois sympa, même si ça te défrise, prends des cours, tu as tout à y gagner, et nous aussi. Tout le monde ne possède pas ce que tu as en réserve. Et, là, on pariera sur une longue carrière.

Et le style, alors ? Rappeuse Yseult ? Seulement si l’on accroche l’étiquette aux stéréotypes que l’on associera stupidement au personnage sans l’écouter. Elle-même affirme faire du « Y-rap ». Sortez vos dictionnaires : « En gros, c’est de la trap [une musique électronique venue du sud des USA dans les années 2000, plutôt dansante, sorte de rap assagi et lyrique] mélangée à de la variété française. Ce sont un peu les deux univers qui, je trouve, me correspondent totalement en ce moment. Et comme je n’arrive pas à choisir entre les deux, j’ai décidé de faire un mélange ! » (Le Devoir) À vrai dire, on pense plus à la – bonne – variété. Celle d’un passé où l’on pouvait autant écouter la musique que les paroles, ce qui n’est plus souvent le cas, il faut bien le dire.

D’ailleurs, nous, on préfère ce clip, un Bad boy soft (cette fois, vous pouvez le montrer aux enfants) et épuré qui permet d’apprécier mieux le travail d’Yseult :

Pour la première (la musique), Yseult se défend bien. C’est soul, ça coule, ça vibre. Il suffit d’un piano pour l’accompagner, comme les grandes dames du jazz. Pour le grand orchestre, on verra plus tard. Et là, on comprend qu’Yzeult n’a pas besoin de faire du nudisme cathodique pour se livrer. Sa musique est un portrait. Ce qu’elle finit par admettre : « Se mettre à nu, ça veut dire lâcher prise, être sincère, c’est quelque chose qui me ressemble beaucoup. Je suis à nu quand je ne mens pas, c’est-à-dire quand je chante : dans la musique, je ne peux pas mentir. » (France-Inter)

Il était une fois Gainsbourg… et Mistinguett

Côté paroles, il y a un net progrès entre la période Corps et Brut, l’album où l’on trouve le fameux Bad Boy. Du mieux (quoiqu’encore trop de ces « oh » et autres « ohé » dont on pourrait aisément se passer), mais on apprécierait que la forme rejoigne le fond. Yseult pourrait faire une entorse à ses principes pour aller un peu plus loin en se faisant aider. Il n’y a pas de honte à débuter. Ses belles idées méritent un peu mieux.

Par exemple, Yseult n’est pas la première à tomber sur un sale mec, et d’autres en ont très bien parlé. Mon homme traitait déjà du sujet (avec un peu d’humour) avec Mistinguett en… 1938 : « Je l’ai tellement dans la peau/Qu’j’en d’viens marteau ». Une histoire d’amour musclée, et courte : « Il m’aime/le temps d’une chanson » (Yseult retrouve la même formule que Gainsbourg et sa Javanaise) pour ses échanges celui « Qui me rend chienne », comme disait Johnny.

L’image contient peut-être : une personne ou plus« Corps » (Photo Thibaut Théodore)

Donc Yseult sera sur la scène de l’Opéra de Tours au printemps 2021. Avec les titres de Brut, son dernier album, dont les premiers clips marchent du feu de Dieu : à l’heure où nous écrivons, quand Corps affiche pas loin de cinq millions de vues en une dizaine de mois, Bad Boy en a déjà près de 200.000 au compteur en quelques semaines. Ça promet, et ça promet aussi une belle bousculade pour avoir une place pour le concert. Surtout si le virus exige une « distanciation » peu en rapport avec les convictions d’Yseult.

Mardi 12 octobre (en remplacement du mercredi 24 mars) 2021 à 20 heures, Opéra de Tours. 
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